Ne me Citez pas©, écrivez de vous(P)

©xP

Citer ce n’est pas écrire. On cite entre guillemets, par écrit. Réciter, c'est mimer d’écrire, dans la mémoire. Citer et réciter font voyager à reculons dans le labyrinthe imaginaire d'un précédent. Il y a une grande différence entre citer et répéter ou redire. Redire les dires de quelqu'un, c'est comme lécher sa salive. Quelques personnes ont la bouche aseptisée et leur salive se trouve stérilisée. D'autres l'ont plutôt colonisée par des bactéries infectieuses. Leurs idées peuvent être bonnes mais ce qu'ils disent sera à bien d'égards nocif. Cela est le fait de la distance entre la pensée et le verbe. Pierre parle en mal de Paul, non pas qu'il y a pensé, plutôt parce que sa bouche sort plus que ce que son esprit édicte. La distance qui sépare la bouche de l'esprit est courte certes chez tout le monde, étonnamment serait-elle proportionnelle à l'ouverture de la bouche. Plus on ouvre la bouche, plus on éloigne l'esprit de ce qui en sort. Écrire et lire, c'est nettement mieux que parler. On saura effacer et éventuellement réécrire, mais jamais on ravalera les dires.

Sont maudits ceux qui vivent de dire des mots non écrits. Ceux qui prêtent la voix aux mots vivants sont bénis, ils guident leur auditoire dans le pèlerinage sur les traces de l'esprit humain. Peu en importe la portée ou le sens, ceux qui écoutent peuvent se faire un utile jugement, ou lire et se réapproprier la pensée.

Est malheureuse la société de la lecture, celle où l'écriture est stérile et où un mot lu meuble tribunes, salons et trottoirs. C'est la société de commérages et de mirages. Un chroniqueur décrira l'amerrissage d'un avion, aussitôt un lecteur le fera décoller et le public le verra voler très haut dans les airs, soufflé par les bouches.

Vous qui venez de lire ce qui précède, vous comprenez qu'il vaut mieux ne pas en parler, ne pas me citer. Si ca vous rejoint, ca vous appartient de le faire lire ou le relire avec votre voix, et encore mieux de vous l’approprier et l’approfondir. Que ca ne fasse personne bondir de lire et d’avoir l’intime conviction d’avoir déjà lu. C’est la propriété de l’écriture de tracer des chemins sur des traces de chemins conduisant au même chalet en temps réels différés, au fond demeurant les mêmes. Car le sens de l’écriture n’est pas rectiligne, plutôt est-il cyclique et circulaire. Je ne copie pas, je respecte les © (droits), et je m'approprie la pensée xP qui me rejoint où je suis rendu dans mon cycle de vie.

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Francois M. ©xP, Québec, 2008